Pour les enfants de la rue... Les rencontres La photo de la semaine
Cartes
Après deux siècles et demi de fermeture, l'ère Meiji, en 1868, propulse le Japon dans les temps modernes. La défaite de la seconde guerre mondiale marque les esprits, mais le Japon se ressaisit et construit une société égalitaire, à cheval sur la civilisation occidentale et ses systèmes traditionnels de valeur. Sa culture est notamment marquée par la notion de groupe et par une langue très poétique. L'empereur est le symbole de l'Etat et de l'unité du peuple mais n'a aucun pouvoir politique.
Le drapeau : |
Economie :
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Avec quelques bons vérins, on arrive à caser deux voitures dans une seule place de garage!! |
Détrompez-vous car après quelques jours, nous commençons à voir que le Japon est un pays merveilleux. La qualité de vie y est finalement très bonne. Dans les rues, pas de bruits assourdissants, les voitures ne klaxonnent que très rarement et les taxis marchent tous au gaz non polluant. Bref, il y a beaucoup de calme et l'esprit " zen " prend très souvent le dessus. L'organisation nous ébahit également. Sur les plages, trois drapeaux de couleurs différentes sont hissés à tour de rôle. Si le brassard qui vous a été distribué correspond à la couleur du drapeau flottant, vous pouvez aller vous baigner. Imaginez ceci en France ! L'esprit de groupe s'en trouve décuplé, ce qui provient aussi de cette habitude ancestrale qu'avaient les japonais de cultiver et récolter le riz ensemble, plutôt que chacun dans son champs. En se promenant un matin, nous croisons ainsi les membres d'une petite entreprise faisant leur gymnastique ensemble.
De même si vous demandez à un japonais qui il est, il vous répondra " Je suis membre de la compagnie une telle ". Un japonais s'identifie tout d'abord par rapport à l'organisation à laquelle il appartient. Sa fidélité envers sa compagnie est telle qu'une fois à la retraite, il est désorienté. Leur femme parle alors d'eux comme des " nuerotchiba ", c'est-à-dire " des feuilles mortes mouillées ". L'image évoque un mari qui ne sait pas organiser son temps et colle sa femme sans que celle-ci puisse s'en débarrasser, comme on a du mal à balayer une feuille morte mouillée et qui colle qui sol. En arrivant ici, tout est sujet à l'étonnement, tant par la fausse image que nous avions du Japon que par les systèmes ingénieux que nous y rencontrons.
Notre première sortie dans les rues de Tokyo se fait dans un quartier marchand. Lieu branché, mais aussi centre des stylistes et des magasins à la mode. Nous croisons un nombre incroyable de boutiques françaises et sommes surpris par le style excentrique des jeunes japonais : cheveux de toutes les couleurs, space-chaussures... Où sont passés les costards gris trois pièces ? Le plus pénible, c'est de se faire comprendre alors qu'aucun de nous ne parle japonais. Dans un petit restaurant, commander un déjeuner devient toute une entreprise. Demander son chemin encore plus, même si chaque personne rencontrée s'est toujours donnée la peine de nous accompagner, preuve de leur générosité et serviabilité. On n'est pas habitué aux coutumes, comme retirer automatiquement ses chaussures lorsqu'on rentre dans un restaurant typique. Typique, mais qui n'exclue cependant pas que les commandes se fassent avec une petite machine électronique.
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La folie du jeu : ils peuvent passer jusqu'à des nuits entières devant ces machines... |
Après quelques heures de Shinkansen, nous ne sommes pas déçus par l'ancienne capitale impériale. Il faut dire que Kyoto est un formidable aperçu de l'alchimie entre le Japon moderne et traditionnel. Des temples shintoïstes et bouddhistes sont parsemés dans toute la ville, au milieu de quelques centres d'affaires. En visitant ces temples, nous apercevons beaucoup de japonais déposer des offrandes, réciter quelques prières.
Nous débarquons en plein typhon, sous des trombes d'eau. Les rues sont jonchées de débris qui surnagent sur des torrents boueux. Poussés par un vent délirant nous errons seuls dans la ville (snif!snif!) à la recherche d'un gite et d'un bol de riz. Nous avons finalement la chance de loger dans une auberge traditionnelle où nous retrouvons une quinzaine d'étrangers de tous les continents. Nous dormons sur des tatamis, dans une pièce séparée des autres par des cloisons de papier, sans bien sûr oublier de retirer ses chaussures !
Des gâteaux de riz pour les sans abris
Et les programmes sociaux au Franciscan Chapel Center
" Des sans abris ? A Tokyo ? Certainement pas !" Nous répondraient la plupart des japonais. Par contre, ce n'est pas l'avis des dizaines d'expatriés et japonais qui distribuent tous les jours, plus de 400 gâteaux de riz aux sans abris.
La fabrication des gâteaux de riz
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La fabrication des gateaux de riz, avec au fond le sémillant père Jacques. |
Dans le parc, une file indienne de 200 hommes nous attend dans le calme. Ce calme nous impressionne. Certains nous attendent depuis 5 heures paraît-il. Nous donnons les petites boîtes en échange d'une courbette. Certains rient en nous demandant 2 rations, l'ambiance est solennelle mais bon-enfant. Malheur, le sac est vide et 50 personnes n'ont pas été servies. A notre grande surprise, la file indienne continue d'avancer, sans rouspéter puis se disperse. En 3 minutes, le parc se vide et devient désert. Certains l'ont quitté, d'autres se sont couchés dans un carton au milieu des buissons.
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Avec Ayumi et Hiro après la distribution du riz. |
Le père Jacques a découvert sa vocation à 37 ans, mais le charisme de cet Accadien (et fier de l'être) s'applique dans la motivation des troupes de la paroisse anglophone de Tokyo. L'engagement du père Jacques est concret : le jour où nous le rencontrons il venait d'accompagner deux jeunes femmes victimes de viols. " Certaines femmes cherchent à travailler dans des bars pour gagner un peu d'argent mais se retrouvent parfois assez vite dans des réseaux de prostitution ". Il fourmille d'idées mais passe son temps à rencontrer ceux qui ont besoin de lui. Il sait aussi séduire les personnes influentes du Japon pour marcher avec elles, main dans la main. " Ici, tout est relationnel, et il faut savoir créer des contacts personnels ". Mais la paroisse cherche par l'exemple à témoigner auprès des japonais : " Ma grande satisfaction, c'est de voir des Japonais qui viennent se joindre aux programmes sociaux de la paroisse. Certains même ne sont pas croyants mais sont touchés par le travail des expatriés".
Ainsi, la paroisse a mis en place le projet " Oasis ", dont l'objectif est de venir en aide et de tendre la main à tous ceux qui au Japon ont besoin d'assistance. Cela peut paraître vague, mais dans une société japonaise où l'étranger est souvent mal considéré, et où le pauvre et le marginal " n'existent pas ", des projets comme celui-ci ont toute leur place. Ces programmes fonctionnent avec des volontaires et sont entièrement financés par des dons.
Ce projet regroupe quatre programmes :
- la distribution de riz aux sans-abris.
- l'assistance aux personnes désespérées qui ont besoin d'aide pour revenir dans leur famille : étrangers sans-papiers, personnes avec des problèmes de santé qui ne sont pas insérées dans le système médical japonais, et jeunes touchés par la drogue et la prostitution.
- les visites et l'assistance aux étrangers qui se trouvent en prison, et n'ont souvent aucune visites, aucun contacts.
- le programme éducatif qui consiste à donner à des enfants et des adultes de tous âges, de toutes races et nationalités, une formation sur la pauvreté, les droits de l'homme, les abus sexuels, la drogue, en lien avec la réalité d'une grande métropole comme Tokyo.
Les bains japonais
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Un bon moyen de pénétrer la culture japonaise : essayer leurs bains traditionnels. |
Quelques jours plus tard, nous reitérons cette expérience à Kyoto. Mais cette fois fois-ci, en plein air!! Dans un cadre féérique, coincés entre deux versants de montagne couverts de sapins, nous avons donc savouré ces instants en attendant la tombée de la nuit. C'est vraiment l'un des rares endroits où l'on peut entrer en contact avec les japonais, de manière plutôt joviale. Un groupe a même demandé à Nico de les prendre en photo. Drôle de sensation que de prendre une photo tout nu... Parfois on a franchement l'impression d'être au jardin d'Eden...
Par l'intermédiaire du père Jacques, leur initiative est vite confrontée aux problèmes de la société japonaise. Il faut savoit en effet que la vision des japonais sur la prostitution , la pédophilie, la pornographie... est très différente de notre manière occidentale d'appréhender ces phénomènes. La réalité est beaucoup plus occultée que chez nous et beaucoup de comportements font partie de la vie quotidienne. En se promenant dans les rues du quartier de Shinjuku, il est normal de voir des collégiennes qui vendent leurs petites culottes ou posent pour des photos... 70% du matériel (vidéo, photos, trafics...) pédophile mondial se fabrique ici au Japon!! Et beaucoup de ces enfants sont "importés" de pays comme les Philippines, la Thailande, l'Amérique du Sud, l'Afrique...
Face à ce constat, ils décident d'élargir leur initiative à deux objectifs majeurs :
Une fois constitués en association, ils se sont mis à chercher des financements pour des centres et des associations qui accueillent les enfants des rues dans chacun des pays concernés par ce fléau. La collecte des fonds se fait par l'intermédiaire de la communauté internationale de Tokyo. L'association organise en effet des événements (soirées, concerts,...) hébergés à tour de rôle par les ambassades, et dont les recettes et les dons servent à financer ces projet. La prochaine soirée aura ainsi lieu à l'ambassade d'Argentine, et servira à financer un centre d'accueil d'enfants des rues à Manille.
L'originalité de cette initiative est de parvenir à impliquer la communauté internationale de Tokyo (et son argent) dans une lutte qui concerne particulièrement le Japon. Cette jeune association s'est également mise en contact avec les autres organisations mondiales qui luttent contre la pédophilie, mais l'un de ses premiers objectifs serait de faire peu à peu changer l'attitude de la société et des dirigeant japonais. La participation des ambassades, et l'influence de la communauté internationale représentent un important moyen de pression sur la société japonaise qui ne veut surtout pas perdre la face. a suivre et à soutenir...
Street Children Ministry
Lutter en amont contre la pédophilie
Durant ces quelques jours, nous avons eu la chance de rencontrer un jeune couple franco-philippin (dont nous ne citons pas les noms par sécurité)qui travaillent à Tokyo.
A Manille, où ils vont régulièrement, ils sont en contact avec le centre Jean Bosco qui accueille des enfants de la rue. Ce jeune centre s'occupe déjà de 140 enfants, mais a besoin de finances pour se développer. Ils décident alors de créer une association, ici à Tokyo, dont le but est de financer le centre Philipin. Mais de petit projet, cette entreprise va vite prendre de l'envergure et se fixer de vastes objectifs.
La pédophilie, au coeur de la société japonaise
Un grand projet prend naissance...
- Faire prendre conscience, ici au Japon, de ces réalités cachées et controlées par la mafia locale, la Yakusa.
- Agir à la source, c'est à dire dans les pays "fournisseurs", en récupérant et en éduquant les enfants avant qu'ils ne soient pris dans les méandres du traffic. Car une fois qu'ils sont au Japon, on ne peut plus rien faire pour eux : le silence de la société, le pouvoir et les menaces de la Yakusa, constituent des obstacles presques insurmontables.
Les rencontres de la semaine
Keiichi Ota et Atsuko Takahashi
Qu'y a-t-il de commun entre Atsuko et monsieur OTA ? Tous les deux ont une admiration profonde pour la France et maîtrisent parfaitement notre langue. Nous avons de la chance de pouvoir rencontrer deux japonais qui puissent nous parler de leur métier et de leur pays.
Monsieur OTA, directeur d'un cabinet de conseil en propriété industrielle
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Mr Ota, à la gauche de Nicolas, avec tout son personnel. |
Cette jeune femme nous impressionne par son palmarès d'activités : virtuose en piano elle a suivi également des cours d'Ikebana (art floral) et des cours pour la cérémonie du thé. Plus amusant, Atsuko a participé à une émission de télévision pour expliquer le succès d'Astérix en Europe. Elle ne nous cache pas qu'elle a eu du mal à comprendre " Astérix chez les Corses " mais elle a bien rit devant tous ces noms barbares tels que " Asurancetourix ", ou " Soupalognonycrouton ".
Nous invitons Atsuko dans un restaurant japonais. On y retire nos chaussures comme dans un lieu familial et intime. Les tables sont basses et des cloisons de papier translucide séparent chaque table. Les japonais savent vivre ! Atsuko travaille au ministère des affaires étrangères et coordonne les voyages d'études offerts aux africains par le gouvernement japonais. Chaque mois, 120 africains effectuent un stage technique de 1 mois. Certains sont médecins, d'autres chimistes ou agriculteurs. Atsuko a servi d'interprète à un Guinéen venu pour un stage de pêche. Elle connaît tout le vocabulaire technique et sait désormais démonter un moteur de bateau en français comme en japonais.
Nous sommes également touché par le cœur de cette fille qui continue de s'occuper de ses parents malades. Son expérience avec le SAMU social en France ne l'a pas laissée indifférente et elle cherche à initier une démarche similaire à Tokyo. Ici, les aides sont de nature matérielle mais rarement sociale et le ministère de la santé lui a expliqué qu'ils n'avaient pas de leçons à recevoir des expériences françaises. Atsuko ne s'inquiète pas et pense pouvoir les convaincre tout comme les sauveteurs français et Suisses avaient convaincus les japonais de leurs méthodes lors du tremblement de terre de Kobe.
La photo de la semaine
Le temple d'or, à Kyoto : un véritable paradis "zen".